Inventaire du patrimoine du
Pays des Vals de Saintonge

Logis de La Jallet, puis ferme, puis Maison Familiale Rurale

Saint-Denis du Pin
Jallet (la), Tilleuls (rue des) 29
Le portail et la demeure.

Historique

La Jallet est mentionnée dès le milieu du 16e siècle : en 1550, René de Villemort en est le seigneur. Cette famille vend ensuite le domaine en 1618, qui passe ainsi dans les mains des Griffon seigneurs des Bellais, des Pallet seigneurs des Rousseaux, des Meaume, puis des Augier, du milieu du 18e siècle jusqu'au milieu du 19e siècle. L'hôtel noble de La Jallet relevait de la seigneurie de Ribemont-Mornay.

En 1755, l'affermage de la seigneurie des Rousseaux, dont dépendait alors le logis de La Jallet, donne lieu à une visite des bâtiments et à la rédaction d'un procès-verbal. Le domaine, probablement déchu de son titre de logis en passant dans le giron des Pallet des Rousseaux, est dénommé simplement métairie. La demeure, en très mauvais état, se compose alors, au rez-de-chaussée, d'un vestibule avec deux chambres de part et d'autre et d'anciens appartements dégradés. On accédait par des échelles aux chambres hautes de l'étage, desservies par une galerie, et aux greniers situés sous le toit. Parmi les dépendances sont mentionnés une grange, une étable et des toits à bêtes. Le cadastre napoléonien de 1822 mentionne quant à lui quatre ailes disposées en carré autour d'une cour fermée.

La demeure du logis est datable, de par ses ouvertures en arc segmentaire délardé et le décor de la porte et de la lucarne, du 18e siècle. Le portail pourrait dater de la même période, toutefois certaines sources indiquent que l'inscription au-dessus de celui-ci serait d'inspiration huguenote, auquel cas il faudrait plutôt le dater du 17e siècle (?). D'après l'Inventaire archéologique du Docteur Texier, ce portail aurait été primitivement surmonté d'un pavillon carré abritant un pigeonnier, détruit au milieu du 20e siècle. Les boulins visibles sur le pignon de la dépendance à gauche en seraient un vestige. Toujours d'après le Docteur Texier, on trouverait à l'intérieur du logis une cheminée du 17e siècle.

Dans la 2e moitié du 19e siècle, la Jallet appartient aux Meschinet, qui font sculpter leurs armoiries au-dessus de la porte du logis. On leur doit probablement aussi les façades actuelles des logements secondaires et de la dépendance à porte en anse de panier face au logis, datables du 2e moitié du 19e siècle. Jean-Mathias de Meschinet est alors membre fondateur de la Société Historique et Scientifique de Saint-Jean d'Angély. Le bâtiment en rez-de-chaussée à gauche de la cour, qui fit peut-être office de chapelle comme l'indique la croix sculptée, porte la date 1908. L'héritière de la famille Meschinet, Marie Louise Joly d'Aussy, épouse en 1884 Auguste Le Roux de Bretagne, également propriétaire de La Folatière à Antezant. Leur fils vendra le logis en 1920.

L'installation de la Maison Familiale Rurale s'est faite à l'initiative de l'Association des familles du canton de Loulay et des cantons limitrophes et de l'abbé Gallay, curé de Coivert. L'étude du projet d'aménagement est confiée à l'architecte André Guillon, puis transmise à l'architecte Marandon, qui mène à bien les travaux bénévolement au début des années 1960. Le gros-oeuvre est confié à l'entrepreneur Francis Joulin : les dépendances du logis sont alors intégralement remaniées. Un nouveau bâtiment a été ajouté à droite de la cour dans le 1er quart du 21e siècle.

Une plaque posée sur le portail couvert en 1967 rappelle que le logis fut la demeure familiale du père Gabriel Richard, né deux cent ans plus tôt. Celui-ci en partit à la Révolution pour le Michigan où il devint "l'apôtre de Détroit" (annexe 1).
Datation(s) principale(s) : 17e siècle (?) ; 18e siècle ; 2e moitié 19e siècle ; 1er quart 20e siècle
Datation(s) secondaire(s) : 3e quart 20e siècle ; 1er quart 21e siècle
Date(s) : 1908
Justification de la datation : porte la date
Auteur(s) : Guillon André (architecte) ; Marandon (architecte) ; Joulin Francis (entrepreneur)
Justification de l'attribution : attribué par source

Description

Les bâtiments du logis s'organisent autour d'une cour fermée par un portail couvert. Celui-ci se compose d'une porte charretière et d'une porte piétonne en plein cintre, flanquées de pilastres et parées de sommiers et d'agrafes moulurés. Une inscription et une plaque commémorative ornent le sommet du portail.

La demeure noble, orientée au sud, présente une toiture à longs pans et à croupes surmontée d'épis de faîtage. La façade principale comporte trois travées, un solin, une corniche se prolongeant sur les autres faces et des pleins de travée appareillés. Les baies en arc segmentaire délardé sont pourvues d'appuis moulurés, tandis que la porte est parée de pilastres et d'un fronton triangulaire interrompu dans lequel sont visibles les armoiries des Meschinet surmontées d'un heaume ainsi qu'un phylactère. La travée centrale est surmontée d'une lucarne passante également ornée de pilastres et d'un fronton interrompu. La façade arrière reprend plus sobrement les éléments de la façade principale, ne possédant ni lucarne ni décor de porte. A droite du logement sont accolés deux anciens logements à deux travées chacun, ainsi qu'une dépendance remaniée.

Les corps de dépendances au sud et à l'ouest de la cour ont été intégralement remaniés, à l'exception d'une large porte en anse de panier, de nichoirs à pigeons visibles sur le pignon à gauche du portail couvert, ainsi que les deux petits hangars agricoles et le bâtiment en rez-de-chaussée portant sur son pignon la date 1918 et une croix sculptée. Un bâtiment récent de forme semi-circulaire a pris place à droite de la cour.
Technique du décor : sculpture
Précision sur la représentation : Porte du logis parée d'un fronton triangulaire interrompu dans lequel sont visibles les armoiries des Meschinet surmontées d'un heaume.
Croix sculptée au-dessus de la porte du bâtiment en rez-de-chaussée.
Inscription(s) portée(s) sur l'édifice : "Ouvres Seigneur ma bouche et faîtes que ma langue publie vos bienfaits et chante vos louanges" au-dessus du portail couvert. "La Jallet logis familial de Gabriel Richard d'où il partit en octobre 1789 pour devenir l'apôtre prestigieux du Michigan membre du congrès des USA mort à Détroit le 13 septembre 1832 victime de sa charité. La Jallet heureux séjour de mon enfance" au-dessus de la porte piétonne. "H. de Meschinet 1822-1894" au-dessus de la porte du logis.

Situation

Référence(s) cadastrale(s) : 1822 C 443 ; 2012 AD 90
Canton : Saint-Jean d'Angély
Statut de la propriété : propriété d'une association
Etat de conservation : bon état ; remanié



Documentation

Documents d'archives

A. D. Charente-Maritime. Série E, 3 E 4109.
1755, 29 avril, 1er et 9 mai : procès-verbal d'état des lieux de la seigneurie des Rousseaux, comprenant les logis du Rousseau, de la Sausaye, de La Jallet et la métairie de la Martinière.

A. D. Charente-Maritime. Série J, 77 J 401.
1960, 10 janvier : devis descriptif et estimatif pour les travaux d'aménagement de la Maison Familiale Rurale.
1962-1963 : devis d'entrepreneurs pour les travaux d'aménagement de la Maison Familiale Rurale.
1962, 1er février : correspondance des architectes Guillon et Marandon.
1965, 18 juin : état récapitulatif des travaux et fournitures effectués en 1961-1962 pour l'aménagement de nouveaux locaux.

A. D. Charente-Maritime. Série W, 1313 W 15.
1967 : dossier concernant la pose d'une plaque commémorative à la mémoire du père Gabriel Richard au logis de La Jallet.

Documents figurés

A. D. Charente-Maritime. Série P, 3 P 5170.
1825 : plan cadastral napoléonien de Saint-Denis du Pin.

Bibliographie

Association Promotion Patrimoine. Châteaux manoirs et logis. La Charente-Maritime. Patrimoine et Médias, 1993, p. 136.

Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, t. 45. Paris, 1896, p. 55.

Chasseboeuf, Frédéric. Châteaux manoirs et logis - La Charente-Maritime, vol.2. Prahecq : Editions Patrimoines et Médias, 2008, p. 547.

Colle, Jean-Robert. Châteaux, manoirs et forteresses d'Aunis et de Saintonge, vol. 1. La Rochelle : Rupella, 1984, p. 216.

Flohic Ed. Le patrimoine des communes de la Charente-Maritime : t. 2. Paris : Ed. Flohic, 2002, p. 879.

Pelletier. Bulletin des travaux de la Société Historique et Scientifique de Saint-Jean d'Angély, t. 2, 1864, p. 251.

Texier, Jean. Inventaire archéologique de l'arrondissement de Saint-Jean d'Angély. "Canton de Saint-Jean d'Angély", t.3. Saint-Jean d'Angély, 1966, p. 18-20.

Tonnelier, P. M. Un Saintongeais en Amérique, Gabriel Richard, de Saintes. Inédit.

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Annexes

  1. Extraits de Tonnelier, P. M. Un Saintongeais en Amérique, Gabriel Richard, de Saintes. Inédit.

    "Gabriel [Richard] naquit à Saintes, rue Saint-Maur, le 15 octobre 1767. Tout enfant, il suivit ses parents à La Jallet. Il y grandit comme un sauvageon, en pleine nature. Aussi, quand vint l'âge d'aller au collège à Saintes, ses débuts furent-ils très durs [...].
    Puis s'orientant de plus en plus vers les missions, il alla terminer sa théologe à Issy, chez les sulpiciens. Mais déjà la Révolution se montrait de plus en plus antireligieuse, et c'est clandestinement dans la chapelle d'un hôtel particulier qu'il reçut l'ordination sacerdotale [...].
    Il s'embarqua à Honfleur, le 2 avril 1792, pour l'Amérique [...]. En 1798, il quitte l'Illinois pour le Michigan, où la mission de Détroit, une bien petite ville encore, l'appelait. C'est là qu'il donne sa mesure. D'une activité aussi débordante qu'ingénieuse, il donne à sa mission une impulsion prodigieuse. Trouvant du temps pour tout, sauf pour son sommeil, il pourvoyait à tout. Il se fit imprimeur (sa presse fut là-bas la première et longtemps la seule), journaliste, professeur d'agriculture, défricheur de terrains, dessécheur de marais, ravitailleur de la population, bâtisseur d'églises et d'écoles, grand voyageur ; il se fit entrepreneur de routes et ouvrit celle de Détroit à Chicago ; prisonnier des Anglais qui redoutaient son influence et son indépendance, pendant la guerre de 1812, et emmené par eux au Canado, ce fut pour lui l'occasion de rendre aux Canadiens des services qu'ils n'ont pas oublié. Père et défenseur des Indiens, il eut le moyen de défendre efficacement leur cause lorsque la confiance générale l'envoya siéger comme député au Congrès de l'Union des Etats. Il fut le seul étranger et seul prêtre à avoir obtenu cet honneur [...]. Vicaire général, il fut à la veille de se voir nommer évêque du Michigan. Le choléra quié éclata à Détroit en 1832 trouva le "Father Richard" déjà épuisé. Il se jeta néanmoins, avec son impétuosité ordinaire, en pleine épidémie. Son dévouement eut raison de ses dernières forces et vite il contracta le mal. En quatre jours il fut emporté, le 13 septembre [...]".


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Illustrations

Fig. 1
Le logis sur le cadastre napoléonien de 1822.
Fig. 2
Une vue aérienne du logis, milieu du 20e siècle.
Fig. 3
Le portail, 1989.
Fig. 4
Les logements, 1989.
Fig. 5
La porte du logis, 1989.
Fig. 6
La porte surmontée d'une croix, 1989.
Fig. 7
Le portail, 1999.
Fig. 8
Le portail du logis, 1999.
Fig. 9
Le portail et la demeure.
Fig. 10
L'inscription au sommet du portail.
Fig. 11
L'inscription commémorative du portail.
Fig. 12
Les logements.
Fig. 13
Le logement noble.
Fig. 14
La porte du logement noble.
Fig. 15
Un détail du fronton de la porte.
Fig. 16
La lucarne.
Fig. 17
La façade arrière du logement noble.
Fig. 18
Le bâtiment en rez-de-chaussée.
Fig. 19
La croix sculptée et la date.
Fig. 20
Les hangars.
Fig. 21
La dépendance accolée au portail, côté cour.
Fig. 22
Les vestiges de boulins près du portail.

Voir

Saint-Denis du Pin, Présentation de la commune

Date de l'enquête : 2013

Région Poitou-Charentes / Service de l'inventaire général du patrimoine culturel. Chercheur(s) : Barreau Pierrick. (c) Région Poitou-Charentes, Inventaire du patrimoine culturel, 2013 ; (c) Syndicat mixte du Pays des Vals de Saintonge, 2013. Renseignements : Centre régional de documentation du patrimoine, 102 Grand'Rue - B.P. 553, 86020 Poitiers cedex, tél : 05.49.36.30.07.

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